insulinorésistance et pic glycémique
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Comprendre l'Obésité

Balance calorique, balance maléfique (Seconde partie) – Insulinorésistance & Co

Obèses : Des gloutons paresseux ou guerriers méritants?

Vous avez compris qu’il ne suffit pas de connaître la quantité d’énergie en entrée et en sortie. Alors donnons quelques exemples, comme les effets de l’insulinorésistance, et des édulcorants pour étayer ce propos.

A l’heure où tout le monde parle de « rééquilibrage », beaucoup d’entre vous pensent certainement que j’enfonce une porte ouverte.

Pourtant l’image de glouton veule et paresseux colle toujours à la peau des personnes obèses. Si bien qu’ils ont tendance à être très durs envers eux mêmes. Voyons donc si les contre-exemples qui suivent permettront de démystifier un peu la chose, et permettre de dé-cul-pa-bi-li-ser, et être bienveillant envers soi-même.

Mais d’abord, parlons chaudière..

  1. Première Partie
    • Introduction
    • Rappel de ce qu’est une calorie
    • Les vendeurs de rêves
  2. Seconde Partie
    • Contre-exemple #1: Notre organisme est une chaudière
    • Contre-exemple #2: L’Insulinorésistance
    • Contre-exemple #3: Les édulcorants
  3. Troisième Partie
    • La bonne lecture de la balance calorique
    • Conclusion
    • Sources, bibliographie, webographie

Contre-exemple n°1 : notre organisme est une chaudière

Oui, moi aussi je semble tomber dans le piège de la simplification en comparant notre corps humain si complexe à une vulgaire chaudière… Mais laissez moi le bénéfice du doute encore quelques instants.

Dès 1918, une étude montrait déjà que si l’on réduisait notre apport calorique en entrée de 30%, la dépense d’énergie de notre métabolisme se réduisait d’autant.

Depuis, bon nombre d’études sérieuses sont venues étayer ce phénomène, qui d’ailleurs fonctionne dans les deux sens. Il est même fréquent de rencontrer des gens qui désespèrent de ne pas pouvoir prendre de la masse si facilement.

Au fond, notre organisme est comme un poêle à charbon : plus vous mettez du charbon plus il le consomme pour produire de la chaleur, et inversement.

(il pollue moins j’espère !)

Effet des régimes hypocaloriques. Cf. Source

Explications et conséquences

Donc si vous apportez moins de calories en entrée, et bien vous perdez du poids, oui. Au début. Mais survient rapidement une stagnation malgré tous les efforts de restrictions consentis. C’est souvent là qu’on craque d’ailleurs, parce dégoûtés, notre motivation s’étiole. En effet l’organisme, réalisant au bout d’à peine quelques jours les quantités moindres qui lui sont apportées, réagit simultanément de deux manières :

  1. Il s’économise: Lorsque vous avez tenté des régimes hypocaloriques, ou quand il vous arrive de sauter un repas, n’avez vous jamais eu la sensation d’avoir plus froid que d’habitude? Ou tendance à être plus fatigué.e? Voire sentir votre tension baisser? Normal, le corps se concentre sur les fonctions vitales et n’assure plus ou bien moins les fonctions de régulation habituelles par souci d’économie. Par contre il vous envoie la sensation de faim !
  1. Il stocke: Dès qu’un peu d’énergie pointe le bout de son nez par le tube digestif, le corps va vite se mettre à le stocker « au cas où, on sait jamais, si la période de disette devait continuer ».

Ces deux réactions expliquent en grande partie l’existence d’un « poids de forme » ou « poids d’équilibre » propre à chacun.e. Les spécialistes le nomment « set point », ou « adipostat ». C’est une régulation automatique (homéostasie) du poids, ou plutôt de la masse grasse sous l’action d’hormones bien spécifiques (on est déjà bien loin de la simplissime histoire de calories là).

Le « set point » n’est pas immuable, et peut être abaissé. Mais alors la perte de poids doit être douce. C’est pourquoi des paliers de stabilisation s’avèrent indispensables dans une perte de poids importante. Notre corps a besoin de temps pour mettre sa référence (son « set point ») à jour. Mieux vaut alors être bien accompagné, par un médecin ou diététicien nutritionniste qui identifiera la meilleure marche à suivre, pour reprendre une courbe de perte de poids et considèrera tous les paramètres et besoins propres à chaque individu en préservant sa santé avant tout.

Conclusion sur le phénomène « chaudière »

Voilà bien un joli contre-exemple de cette mauvaise lecture, maléfique, de la balance calorique. En réalité, les deux paramètres: « calories en entrée » et « calories en sortie », NE SONT PAS indépendants. On ne peut donc pas vraiment dépenser beaucoup plus que ce que l’on mange, et on ne peut pas manger beaucoup moins que ce que l’on dépense non plus.

Contre-exemple n°2 : l’insulinorésistance

Pour parler de insulinorésistance, ou résistance à l’insuline, définissons d’abord ce qu’est l’insuline.

L’insuline est une hormone très importante qui participe à la régulation de notre glycémie. Elle est est hypoglycémiante. Son rôle est de réduire à tout prix notre taux de glucose sanguin pour le maintenir à environ 1 g /L. Pour ce faire, elle stimule l’utilisation du glucose par nos cellules utilisatrices.

Insulinorésistance - causes et conséquences

Définition et effets de l’insulinorésistance

L’insulinorésistance se traduit par une réduction de la captation de ce glucose par les tissus cibles, notamment nos muscles. Les muscles utilisent en temps normal 80% du glucose sanguin.

La diminution de leur sensibilité est donc très pénalisante pour maintenir notre glycémie basse. Elle induit donc une hyper production d’insuline supplémentaire, et qui par effet de compensation aura pour conséquence le stockage d’une plus grande proportion de ce glucose, sous forme de graisses dans le tissu adipeux.

Si vous êtes en situation d’obésité sévère ou plus, avez-vous remarqué la grande fatigue éprouvée systématiquement juste après le repas quelque soit les quantités ingérées? Cette fatigue intense est due à la mobilisation tout aussi intense d’énergie nécessaire au pancréas pour synthétiser l’insuline. C’est aussi le pancréas qui fabrique la plupart des enzymes digestives qui opèrent dans notre intestin. Et les puristes me rappelleront à l’ordre: oui, l’estomac n’est pas en reste non plus.

Causes de l’insulinorésistance: petit à petit l’oiseau (de malheur) fait son nid

L’insulinorésistance comporte des causes multifactorielles. Principalement un état inflammatoire chronique (= pas aigu ni symptômes, mais durable et continu dans le temps), entretenu par le tissu adipeux viscéral (obésité abdominale).

En excès, le tissu adipeux secrète de nombreuses substances appelés cytokines ou adipokines dont la plupart ont un effet pro-inflammatoire. Ainsi la résistine, excessive en cas d’obésité abdominale, induit comme son nom l’indique l’insulinorésistance. A l’inverse, l’adiponectine dont l’effet est antagoniste, voit sa production fortement diminuée… La leptine elle, est noyée dans l’insuline et donc inaudible par notre cerveau mais elle n’en demeure pas moins elle aussi pro-inflammatoire.

D’autres facteurs comme l’âge, les prédispositions génétiques, la sédentarité, certains médicaments contribuent aussi à l’insulinorésistance. Et l’alimentation bien entendu: nous consommons par exemple beaucoup trop d’acides gras Oméga 6 essentiels, mais pro inflammatoires (tournesol) par rapport aux Oméga 3 tout aussi essentiels (colza, noix, lin, poissons gras) mais anti inflammatoires. Tout est question d’équilibre, mais pas calorique ici en l’occurrence.

Stockage du glucose en graisse par l’hyperinsulinémie induite de l’insulinorésistance Cf. Source

Conclusion sur l’insulinorésistance

Voilà donc un second joli contre-exemple de la mauvaise lecture de la balance calorique, puisqu’un même apport calorique en entrée n’aura pas du tout le même effet produit selon que l’on est insulino-résistant ou pas.

Cercle vicieux ouroboros

L’insulinorésistance est un phénomène à la fois insidieux et vicieux.

Insidieux, car lorsque les conséquences de l’insulinorésistance se déclarent (hyperglycémie à jeun de type pré-diabétique, légère hyper tension artérielle, bilan lipidique montrant une hypertriglycéridémie et une baisse du cholestérol HDL), le processus a débuté bien des années auparavant, dès les premiers excès pondéraux de l’abdomen. Vous savez, ce moment ou l’on vous qualifiait de « bon vivant » avec vos premiers embonpoints?

Vicieux aussi, car auto-alimenté : l’insulinorésistance crée un stockage accru de notre tissu adipeux qui à son tour contribue à plus d’insulinorésistance. Et ainsi de suite…

Je crois ici utile de rappeler aux grands obèses qui me lisent de ne surtout pas vous décourager, bien au contraire. Comprendre son obésité, c’est mieux s’armer pour la combattre. Ici on cessera de culpabiliser parce qu’on comprend maintenant pourquoi « on reprend vite ». Et surtout retenez qu’il existe des solutions pour re-sensibiliser vos cellules à l’insuline et sortir de ce cercle vicieux. En particulier l’activité physique, adaptée et régulière. Et comme je le dis souvent: toujours avec plaisir et gourmandise, c’est ça qui est bien: pas besoin de s’épuiser inutilement ni souffrir pour re-sensibiliser nos muscles à l’insuline et redynamiser notre métabolisme.

Contre-exemple n°3 : les édulcorants

Avec zéro calories, les édulcorants ne contribuent pas au pic glycémique

Le rôle des édulcorants est de donner au consommateur le même plaisir gustatif que le vrai sucre, sans les calories. Parfait exemple donc pour l’exercice intellectuel qui nous occupe ici. Puisque l’on n’apporte aucune calorie à notre organisme, selon l’interprétation traditionnelle de notre balance calorique, un édulcorant ne devrait avoir aucune incidence sur la prise de poids en sortie n’est-ce pas?

Certes, par définition les édulcorants ne se retrouvent pas sous forme de glucose sanguin après avoir été ingérés. Ils ne participent donc pas à l’élévation du pic glycémique qui suit habituellement notre repas. Glycémie qui est abaissée ensuite par l’insuline selon différentes voies dont le stockage sous forme de graisses dans notre tissu adipeux.

La digestion, ça commence dans la tête

Si les étiquettes sur les produits à base d’édulcorant mentionnent bien « Zéro Calories », elles oublient de préciser que la sécrétion de l’insuline n’est pas uniquement stimulée par les calories du glucose sanguin, une fois le vrai sucre digéré.

Notre cerveau tient aussi un rôle très important dans la digestion, qui commence d’abord par ce qu’on appelle la « phase céphalique ». Cette phase céphalique c’est ce moment que vous connaissez forcement. Vous savez, celui qui vous fait tant saliver rien qu’au regard ou à l’odeur de la nourriture? Ou même par le doux son que produit sa cuisson? Et plus encore en prenant une bouchée, avec les autres sens comme le goût et le toucher pour apprécier la texture? La sécrétion de salive peut même se produire par simple imagination. Lorsque vous projetez votre prochaine sortie dans votre restaurant préféré par exemple.

C’est donc bel et bien notre cerveau qui stimule en premier nos petites glandes salivaires et prépare la digestion qui s’annonce. Mais croyez-vous qu’il s’arrête la? Bien sûr que non! Ce qui se produit avec nos glandes salivaires se produit simultanément partout ailleurs dans notre système digestif. Notre estomac avec le suc gastrique. Notre foie avec les sels biliaires. Mais aussi notre pancréas avec à la fois le suc pancréatique qui contient toutes les enzymes qui serviront à dégrader les nutriments dans l’intestin, mais aussi notre vedette du moment… J’ai nommé l’insuline bien sûr!

Et oui, notre organisme n’attend pas que le pic glycémique s’installe pour secréter l’insuline. Il anticipe, commandé par notre cerveau qui voit, sent, touche, goute, entend, et même imagine cette promesse de nourriture !

Effet et conséquence des édulcorants : la double punition

Revenons sur le rôle des édulcorants… C’est quoi déjà? Ah oui : il s’agit de tromper notre cerveau justement. Et bien ils le font tant et si bien qu’ils contribuent directement au pic insulinique, quand bien même il n’apportent aucune calorie, ni glycémie supplémentaire. Certains sont même suffisamment proche de la molécule de glucose pour tromper aussi notre pancréas…Qui secrètent d’autant plus d’insuline.

Alors, imaginons qu’en tant qu’obèse (ou pas d’ailleurs), je prenne un coca light vers 17H. C’est à dire 2 ou 3 heures avant l’heure du dîner. Que se passerait t’il?

  • 1ère punition: Sous l’effet de l’insuline secrétée, alors même que ma glycémie n’a pas augmenté, le glucose déjà présent dans le sang sera capté par mon tissu adipeux pour être stocké en graisses.
  • 2nde punition: Dans les 30 min à 1 heure qui suivent, ma glycémie devient trop faible. Il est 17h30-18H et j’ai une fringale! Du coup, je grignote avant le prochain repas. Ou bien j’arrive à patienter, mais j’aurai tendance à prendre une double ration, car je mourrai de faim!

Quelque soit le scénario retenu, il résulte qu’un excès calorique aurait pu être évité si à la limite, j’avais pris un vrai coca avec du vrai sucre dès le départ!

Les édulcorants Cf. Source

Conclusion sur les édulcorants

En conclusion, un apport avec zéro calorie en entrée de notre organisme ne signifie pas zéro impact sur les calories en sortie pour autant. La consommation d’édulcorant déclenche un stockage d’énergie non nécessaire sous forme de graisse et donc une prise de poids. C’est cette dépense imprévue qui en réalité génère un besoin d ‘apport calorique supplémentaire qui s’ensuit rapidement.

Vous notez la subtilité de la dernière phrase? Voilà notre troisième indice pour une bonne lecture de notre balance calorique: C’est la dépense imprévue de calorie en sortie sous forme d’un stockage, qui génère un besoin d’apport de calories en entrée sous forme de fringale. Et non l’inverse!

Moralité: tant qu’à vouloir apprécier une boisson ou un plat sucrés entre les repas… Mieux vaut encore du vrai sucre qu’un édulcorant. Les édulcorants ont aussi d’autres effets délétères, comme sur le microbiote par exemple. Mais cela pourrait faire l’objet d’un billet à part entière.

NB: Notez qu’ici je parle d’une prise d’édulcorant pour un soda, en dehors d’un repas. Un bon diététicien nutritionniste pourra toutefois vous conseiller un édulcorant. S’il le fait, c’est que votre contexte personnel le justifie. Si cet article a pour objectif de bousculer le dogme de la balance calorique, ce n’est pas pour en instaurer un autre ! Dans certains cas, généralement au moment des repas, le remplacement de produits sucrés par de l’édulcorant peut s’avérer d’une grande utilité pour atteindre vos objectifs.

Voilà, ainsi s’achève la seconde partie. J’espère que vous aurez vu au travers de ces trois seuls contre exemples comme la lecture classique et simpliste de notre vieille balance calorique occulte des phénomènes bien plus complexes qui se produisent en coulisses.

La troisième et dernière partie sera consacrée à montrer – enfin- quelle doit être la bonne manière de lire la balance calorique suivie par une conclusion générale.

D’ici là chers guerrières et guerriers de l’obésité… Soyez braves, mais toujours gourmands!

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